samedi 21 juillet 2018

Simone Veil au Panthéon, le puissant symbole

La symbolique est particulièrement forte en cette époque troublée.
On ne sait si Emmanuel Macron y a pensé un peu ou beaucoup quand il a décidé de faire rentrer Simone Veil au Panthéon mais cette femme, au parcours de vie extraordinaire, condense tout ce que la résistance humaniste se doit de faire pour empêcher les ombres assassines de toutes sortes de revenir hanter la démocratie républicaine.
Elle est l’incarnation de cette résistance.
Humaniste, centriste, européenne, elle n’a pas calculé ses combats, nos combats: celui contre les extrémismes de droite et de gauche, elle, l’ancien déportée d’Auschwitz; celui pour le droit des femmes, elle, la ministre qui a porté la loi sur l’avortement (dont elle considérait qu’il n’était pas un acte banal) pour éviter des drames épouvantables; celui pour une Europe unie, elle, la présidente du Parlement européen inlassable ambassadrice de l’Union européenne.
Et même celui, qui lui est reproché par certains, d’avoir exprimé des «réserves» quant à l’adoption d’enfants par des couples homosexuels dont on ne sait toujours pas, en l’absence de toute étude exhaustive, si elle a ou pas de conséquences psychologiques négatives sur ceux-ci.
Ministre plusieurs fois, membre du Conseil constitutionnel et de l’Académie française, elle était femme de pouvoir, mais d’un pouvoir qui fait et non qui se montre, d’un pouvoir qui n’est pas partisan ou clientéliste.
Non seulement elle était ouverte à toutes les évolutions de la société – elle a regardé mai 68 avec bienveillance – mais elle voulait avancer – elle fut une promotrice de la réconciliation franco-allemande, refusant le raccourci allemand=nazi – et ne craignait pas de dire qu’elle se sentait à gauche pour certaines questions et à droite pour d’autres.
Femme forte qui n’appréciait guère la mollesse et la trahison, elle savait que le Centrisme n’était pas une pensée sans saveur et sans couleur.
Elle savait que réunir les gens plutôt que de créer des affrontements entre eux, était le meilleur moyen de promouvoir une société humaniste dont nous avons tant besoin aujourd’hui au moment où les harangues haineuses des populistes démagogues, des extrémistes, des autocrates et autres dictateurs menacent cette démocratie libérale pour laquelle elle s’est toujours battue.
Quoi qu’il en soit, les peuples ont parfois une certaine sagesse…
En l’espèce, les Français, pendant des années, l’ont placée comme une de leurs personnalités préférées et, surtout, comme leur personnalité politique favorite et souvent la seule!
Comme quoi, avec des femmes de la stature de Simone Veil, la politique peut retrouver ses lettres de noblesse qui sont d’agir pour le bien de ceux qui vous ont fait confiance en votant pour vous.
Simple à dire, pas facile à faire d’où une panthéonisation amplement méritée.


vendredi 20 juillet 2018

Trump-Poutine, la rencontre des deux ennemis de l’Europe

Il fut un temps où les Etats-Unis furent, non seulement, un allié sans réserve de l’Union européenne mais, surtout, un de leur plus fort soutiens et, encore plus, le pays qui milita le plus pour sa création, certains de ses adversaires affirmant même que l’union est une créature des Américains.
Si l’on ne peut préjuger de la politique future étasunienne et du réel sentiment du peuple américain, force est de constater qu’à la tête de la première puissance du monde et du premier allié – jusqu’à présent – de l’Union européenne, se trouve un personnage qui hait celle-ci mais aussi les Européens avec constance et application.
Ses diatribes contre l’Allemagne, ses insultes vis-à-vis de sa dirigeante Angela Merkel et contre la première ministre britannique, Theresa May, son soutien à tous les populistes de l’UE qui veulent remettre en cause son existence, son «conseil» à Emmanuel Macron de la quitter (en lui faisant miroiter un accord commercial entre la France et les Etats-Unis), sans oublier la guerre commerciale qu’il vient de lancer avant tout contre les produits européens font patrie d’une longue liste d’attaques contre l’Europe unie que l’on ne saurait épuiser en un éditorial.
Un comportement qui est une aubaine pour le deuxième ennemi de l’UE: Vladimir Poutine.
L’autocrate, en l’espèce, ne fait que suivre la traditionnelle politique étrangère de la Russie depuis des siècles et qui n’a jamais accepté que les Européens récemment s’unissent, elle qui a des visées hégémoniques sur le continent qu’elle considère, depuis la guerre froide, à l’instar du continent américain pour les Etats-Unis, depuis la doctrine Monroe, comme sa zone d’influence «naturelle» et, surtout, un territoire à contrôler pour sa sécurité.
On pourrait faire une liste encore plus longue des agressions de Poutine contre l’Union européenne (et ses alliés) avec, entre autres, l’envahissement de l’Ukraine et l’annexion de la Crimée sans oublier toutes les cyber-attaques contre ses institutions et ses élections démocratiques.
La nouveauté, c’est bien entendu, que la détestation de l’Union européenne réalise désormais une alliance objective entre les Etats-Unis et la Russie (soi-disant les deux grands ennemis de la planète…), une nouvelle donne pour les Européens.
Ecrire cela est bizarre, voire surréaliste, mais bien réel.
Même si la présidence de Trump, il faut l’espérer, ne sera qu’un épiphénomène à jeter dans les poubelles de l’Histoire, cette alliance objective est un sérieux avertissement pour ces Européens.
Ainsi, du jour au lendemain, ils peuvent être confrontés à l’hostilité de deux grandes puissances militaires qui s’unissent pour les diviser et détruire leur union, ce qui montre, par ailleurs,, que cette dernière, loin d’être un mirage de puissance, est bien une entité internationale qui compte malgré toutes les lézardes qui menacent sont existence.
Cela devrait, au moment où Trump et Poutine se rencontrent aujourd’hui à Helsinki (pays membre de l’Union européenne…), provoquer une réaction des Européens et une relance forte de l’Union avec tous ceux qui veulent avancer vers une plus grande intégration qui, ne l’oublions jamais, n’est pas une lubie de quelques rêveurs, mais une obligation si l’Europe veut encore avoir son mot à dire sur le monde et, surtout, sur son propre avenir qui ne peut se décider à Washington, Beijing ou Moscou.
Les Européens sont au pied du mur.
Certes, il est haut, mais pas infranchissable comme l’ont répété tous les leaders centristes qui ont participé à la construction d’une des plus grandes aventures de rapprochement de peuples qui, hier, s’entretuaient.


Le combat pour une information «vraie»

Les députés ont donc voté les dispositions (dans deux lois séparées) contre les «fausses informations» («fake news» en anglais d’où le terme français est issu) et la «manipulation de l’information» en période électorale, c’est-à-dire trois mois avant un scrutin national (municipales, législatives, présidentielles, etc.).
Une «fausse information» étant définie dans ces lois comme «toute allégation ou imputation d’un fait, inexacte ou trompeuse».
Rappelons par ailleurs que ce n’est pas celui qui invente cette fausse information qui sera sanctionné mais celui qui la diffuse de «manière délibérée» et de «mauvaise foi».
C’est, à la fois une législation de bon aloi et de circonstance.
De circonstance car elle vise à répondre au déversement de fausses informations par des officines payées ou appartenant à des entités étatiques ou des groupes partisans qui veulent délibérément fausser le rendez-vous primordial que représente dans une démocratie républicaine, une élection des représentants du peuple.
De bon aloi parce qu’elle reconnait que la fausse information et que la manipulation de l’information sont des cancers de la démocratie représentative à l’ère de l’information en continu et des réseaux sociaux.
Bien entendu, ces fausses informations et ces manipulations ont toujours existé, on les a appelées au cours des temps rumeurs, propagande, désinformation, endoctrinement, intoxication, …
Il faut bien comprendre que dans une démocratie républicaine libérale et représentative, le rôle du savoir et de l’information sont primordiales pour le bon fonctionnement du système et des institutions.
Seul un citoyen qui sait et qui est informé, peut choisit, en toute connaissance de cause, ce qui est bon pour lui.
Seul un peuple à qui l’on a transmis le savoir et à qui l’on permet de s’informer, peut choisit son présent et son avenir en toute responsabilité.
Cette loi ne répond évidemment pas à cette mission essentielle de ceux qui transmettent le savoir et l’information mais elle est une reconnaissance concrète, avec d’autres dispositions qui existent déjà, de cette mission pour la démocratie républicaine.
Pour autant, il reste encore tellement à faire pour que le citoyen possède le savoir et les informations adéquats afin d’être capable de se faire sa propre opinion en toute indépendance.
Si l’on devait, par exemple, relever toutes les «fausses informations» et toutes les «manipulations de l’information» auxquelles nous sommes confrontés quotidiennement, et pas seulement sur des plateformes internet malhonnêtes ou phagocytées par des «trolls», nous verrions que la tâche est immense et particulièrement compliquée.
Manipuler un fait par idéologie, que ce soit par un politique, un spécialiste ou un journaliste est, à la fois, courant et normal puisque ceux-ci ont une opinion en tant que citoyens et en tant qu’acteurs engagés.
Et cela s’appelle la liberté d’expression qui est fondamentale dans une démocratie républicaine.
Mais celle-ci entre souvent en collision avec la réalité qu’elle interprète et inscrit dès lors dans un contexte partisan où l’individu ne peut souvent plus faire la part des choses entre l’opinion et le fait.
L’important n’est pas qu’un centriste ne croit pas ceux qui diffusent la pensée du Centre, idem pour ceux qui sont de gauche et de Droite avec leurs pensées politiques respectives.
Non, il s’agit de permettre aux personnes d’acquérir pour leur vie durant le savoir et l’information juste ainsi qu’une capacité à décrypter, à analyser et à se faire une opinion en toute indépendance.
Il s’agit de leur permettre de trouver des canaux d’informations dont le but n’est pas de diffuser une idéologie ou de faire du sensationnalisme afin de gagner le plus d’argent possible mais de permettre, autant que possible, de trouver le fait brut.
A eux, ensuite, de l’interpréter et, pour cela, de s’aider de toutes les opinions diffusées.
On en est encore loin, tant le service public de l’audiovisuel est loin de cette configuration, à la fois parce qu’il permet dans son fonctionnement de teinter idéologiquement toute l’information et parce qu’il se bat contre les chaînes commerciales dont le but premier est de dégager des bénéfices en se servant de leurs programmes pour attirer le chaland-téléspectateur.
Quant à ceux qui crient au scandale pour les dispositions législatives qui viennent d’être votées par l’Assemblée nationale, parlant de censure, atteintes à la liberté d’expression et autres bâillonnements de l’information, il ferait mieux de sa battre pour que le citoyen soit en capacité de recevoir une information la meilleure et la plus neutre possible par le biais d’un vrai service public citoyen de l’information qui coexisterait avec toute la presse d’opinion et tous les réseaux sociaux.
Ce ne serait pas la solution ultime – qui n’existe sans doute pas – parce que nous sommes des êtres communicants et que nous vivons dans un monde d’hyper-communication où  nous disons tout et n’importe quoi et où nous sommes sensibles au tout et n’importe quoi des autres, surtout où le mensonge à une fonction sociale importante...
Néanmoins, ce serait une avancée salutaire pour la démocratie républicaine.